Birmanie>Net Hebdo n° 09
La lettre d'information hebdomadaire d'Info Birmanie


Sommaire
> TotalFinaElf, suite
> Le scandale du "bataillon Total"
> L'émissaire de Kofi Annan reprend la route de Rangoun
> Un fabricant de cigarettes bien embarassé
> Un représentant du Timor en Birmanie
> La conscription forcée stoppée par la junte ?

TotalFinaElf, suite
Source : AFP, 12 novembre 2002

Le président de TotalFinaElf, Thierry Desmarest, a affirmé que le groupe pétrolier n'avait "jamais recouru, directement ou indirectement, au travail forcé" en Birmanie, dans un entretien au Figaro Entreprises daté de mardi. "Le chantier a été intégralement conduit sous notre contrôle et nous n'avons jamais recouru, directement ou indirectement, au travail forcé", a déclaré M. Desmarest. "Nous avons soigneusement sélectionné les dirigeants de la filiale sur des critères de personnalité, de rigueur et de compétence. Notre contrat spécifie qu'il y aurait des salariés locaux, en vérifiant en permanence que les droits humains sont respectés", a-t-il ajouté. "Il faut aussi savoir que le travail forcé est désormais officiellement aboli par le Myanmar lui-même, et que nous sommes très vigilants à ce que cette législation soit strictement respectée dans la zone où nous travaillons", a poursuivi M. Desmarest."J'aimerais aussi insister sur les nombreux programmes de développement socio-économique que nous avons engagés au Myanmar. Ils ont eu un impact important bien réel auprès des populations riveraines de nos chantiers", a-t-il ajouté.
TotalFinaElf a toujours nié les accusations d'implication dans des pratiques de travail forcé en Birmanie, dont il a régulièrement été accusé par des militants des droits de l'Homme, des ONG et l'opposition politique à la junte militaire birmane. Interrogé sur ces accusations, Thierry Desmarest a déclaré au Figaro : "Faut-il parler de désinformation ou de mensonge pur et simple ?""Je peux vous assurer que le président du comité d'éthique du groupe connaît bien, désormais, la Birmanie et qu'il a rencontré les ONG qui nous ont mis en cause", a-t-il ajouté. "Cette instance sert non seulement à expliquer nos principes mais aussi de recours pour tous les salariés du groupe qui auraient un doute sur les pratiques observées autour d'eux, y compris de leur supérieur hiérarchique", a conclu sur ce thème Thierry Desmarest.
Il aurait pu ajouter que le comité d’éthique sert surtout à faire passer le message du groupe vers l’extérieur, ce qu’on appelle communément " communication ". Une fois de plus, la justice française dira qui, des ONG, des militants des droits de l’Homme, des démocrates birmans (et notamment Aung San Suu Kyi), ou de TFE, désinforme ou ment.



Le scandale du "bataillon Total"
Source : Courrier International, 9 novembre 2002

Dans l'Hexagone, l'affaire est traitée fort discrètement, mais "Asia Times" ne veut pas la laisser passer. "La compagnie pétrolière TotalFinaElf est aujourd'hui poursuivie en France pour des actes contraires à l'éthique, en particulier pour des violations des droits de l'homme en Birmanie."
Le quotidien thaïlandais retrace le contexte des exactions présumées du groupe français. "Les plaignants affirment qu'en 1995 - alors qu'elle n'était encore que TotalFina - l'entreprise a loué les services de l'armée birmane pour protéger la construction d'un oléoduc. En réalité, les soldats envahissaient des villages, s'emparaient des habitants et les transformaient en ouvriers corvéables à merci."
La plainte provient de deux des ouvriers en question, qui ont pu s'enfuir et vivent aujourd'hui quelque part en Asie du Sud-Est. "En outre, les allégations de ces deux personnes sont corroborées par plusieurs témoignages de déserteurs de l'armée birmane", précise "Asia Times".
Des violations des droits de l'homme reconnues
Le journal poursuit son réquisitoire. "L'Organisation internationale du travail et la commission onusienne des droits de l'homme ont régulièrement condamné les pratiques de Rangoon sur le travail forcé."
Autre argument très fort, TotalFinaElf n'a pris en charge que 400 des 700 kilomètres de cet oléoduc qui relie aujourd'hui la mer d'Andaman à une centrale thaïlandaise ; le reste a été construit par deux compagnies du Sud-Est asiatique et par la société américaine Unocal. Or "un tribunal des Etats-Unis a estimé récemment que les deux anciens ouvriers avaient 'largement prouvé qu'Unocal était complice de violations des droits de l'homme' et qu'à ce titre la société américaine pouvait être poursuivie", remarque "Asia Times".
En France, Thierry Desmarest peut bien nier tout abus devant une commission d'enquête parlementaire - reconnaissant du bout des lèvres avoir demandé la protection de l'armée birmane -, "Asia Times" rappelle que ces troupes étaient connues dans toute la région sous le nom de "Bataillon Total".
Et le quotidien thaïlandais de noter qu'"en France la compagnie pétrolière est déjà accusée de négligence dans deux affaires : l'explosion de l'usine AZF à Toulouse et le naufrage du pétrolier 'Erika', à proximité des côtes bretonnes". Conclusion implicite du journal : les dénégations de TotalFinaElf ne trompent que ceux qui veulent vraiment y croire.
Les autres pourront se faire une idée de l’horreur des exactions commises par l’armée birmane au travers des photos publiées par Dictator Watch sur son site
http://www.dictatorwatch.org
Contact: Roland Watson, roland@dictatorwatch.org


L'émissaire de Kofi Annan reprend la route de Rangoun

Source : AFP, 11 novembre 2002

Razali Ismail, envoyé spécial du secrétaire général de l'ONU Kofi Annan, doit tenter à partir de mardi à Rangoun de faire redémarrer un dialogue "de réconciliation nationale" entre la junte et l'opposante Aung San Suu Kyi qui semble au point mort. C'est sous les auspices du diplomate malaisien qu'en octobre 2000 les généraux au pouvoir à Rangoun et la dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND), alors en résidence surveillée, avaient entamé un dialogue historique et secret en vue d'une démocratisation avec, à terme, un
gouvernement civil. Deux ans plus tard, M. Razali en est à sa 9e visite, Mme Suu Kyi a recouvré la liberté, mais le dialogue n'aboutit à rien, selon les analystes. Sa précédente visite, qu'il avait qualifiée de "productive", ne paraît pas avoir produit grand chose. L'optimisme suscité par la libération de Mme Suu Kyi en mai est retombé et la Birmanie n'a toujours pas procédé aux libérations massives de prisonniers politiques que l'opposition et les pays occidentaux lui demandent, alors qu'il reste 1.300 prisonniers d'opinion dans ses geôles. La communauté internationale a beau être accaparée par les menaces d'une guerre américaine contre l'Irak ou les retombées de l'attentat de Bali, elle commence aussi à perdre patience face à l'immobilisme des généraux du Conseil d'Etat pour la paix et le développement (SPDC).
Avant la visite de M. Razali, Washington a reproché à Rangoun de n'avoir rien concédé depuis la libération du Prix Nobel de la paix.
"Après une mesure aussi positive cette année, nous nous attendions à ce que le dialogue entre le régime en Birmanie et Aung San Suu Kyi soit largement engagé maintenant", a déclaré le porte-parole du Département d'Etat (ministère des Affaires étrangères américain) Richard Boucher.
"Nous n'avons vu aucun signe de ces discussions cruciales pour l'avenir de la Birmanie", a-t-il ajouté, avant de réaffirmer le soutien de Washington à M. Razali. Kofi Annan a lui aussi exprimé sa frustration devant la lenteur du processus avant la visite de cinq jours de M. Razali, qui rencontrera notamment Mme Suu Kyi. M. Annan "craint que l'élan suscité par le processus de réconciliation nationale ne puisse retomber si des progrès tangibles ne sont pas réalisés rapidement", a déclaré son porte-parole, Fred Eckhard.M. Annan, a-t-il ajouté, attache une importance particulière à l'entretien que M. Razali doit avoir avec le numéro un de la junte, le généralissime Than Shwe.Au siège de la LND, on ne s'attend pas à une percée, tout en continuant d'accorder la confiance à M. Razali et à sa mission. "C'est le facilitateur de dialogue", explique le porte-parole de la Ligue, U Lwin, "tout le monde espère, mais ça dépend vraiment des deux côtés". "Pour notre part, nous avons déjà tendu la main et sommes prêts à nous asseoir à la même table pour discuter de tout sujet, à tout moment. Nous sommes patients, mais nous n'avons pas de réponse", indique le fidèle lieutenant de Mme Suu Kyi. Le porte-parole a précisé que des messages étaient échangés entre les deux
anciens clans ennemis, "mais ça, ça ne veut pas dire le démarrage d'un dialogue de substance", ajoute-t-il en référence au dialogue politique qui
était censé commencer une fois un minimum de confiance établi. Un analyste politique souligne la difficulté de la tâche de M. Razali,
"coincé entre une communauté internationale qui perd patience et exige des résultats rapides et une brochette de généraux qui n'ont rien envie de
changer à la hâte". La junte n'avait pas voulu abandonner le pouvoir en dépit du raz-de-marée de
la LND aux élections de 1990 et beaucoup d'analystes estiment que c'est surtout le marasme économique dans lequel est plongée la Birmanie qui pourrait inciter Rangoun à faire des concessions. "Nous ne nous laisserons influencer ni par les discours mielleux ni par les
menaces", a récemment averti le numéro trois du régime, le général Khin Nyunt. Mr Razali a depuis annoncé qu’il pourrait quitter ses fonctions si aucun progrés n’etai fait dans les prochains mois.
De retour d'une récente visite au Myanmar, le Rapporteur spécial de l'ONU pour les questions des droits de l'homme dans ce pays a affirmé qu'il n'y avait pas encore de discussions entre le Gouvernement et l'opposition sur l'avenir politique du pays. Lors d'une conférence de presse aujourd'hui à New York,
Paulo Sergio Pinheiro a précisé que la question des élections et de la liberté des partis politiques d'opérer librement n'avait pas encore été abordée; en outre, la
libération des prisonniers politiques se faisait à un rythme très lent. Le Rapporteur spécial a noté en revanche que depuis la libération de la fameuse dissidente Aung San Suu Kyi, aucune mesure de rétorsion contre les personnes qui l'avaient rencontrée n'a été prise, et que désormais les responsables politiques étaient libres de se déplacer à leur gré.



Un fabricant de cigarettes bien embarassé

Source : Financial Times, 12 novembre 2002

Kenneth Clarke, ancien dirigeant de British American Tobacco, avait souvent repeté son opposition aux investissements en Birmanie. Il s’est retrouvé dans une posture délicate quand on lui a demandé des precisions sur le joint-venture signé par son groupe avec la junte birmane. Il a repondu : " je dois admettre que je ne suis pas très à l’aise avec notre investissement en Birmanie. Il est problématique que des entreprises comme la notre collaborent avec un régime extremement deplaisant qui est totalement contraire à nos notions de libértés et de démocratie ".
Cela ne l’a pas empeché de rejeter les demandes faites à BAT de se retirer de Birmanie. L’ONG anglaise Burma Campaign UK qui a reçu cette reponse lance aujourd’hui une campagne mondiale pour obliger BAT à se retirer de Birmanie
Burma Campaign UK et Info Birmanie sont toutes deux membres de l’European Burma Network, le reseau européen des ONG travaillant à informer sur la situation en Birmanie, à relayer le message des démocrates birmans, et à sensibiliser les decideurs politiques, les entreprises et les touristes européens sur les consequences de leurs rapports avec ce pays.



Un représentant du Timor en Birmanie
Source : ABC Radio Australia News, 10 novembre 2002

Le ministre Est-Timorais des Affaires Etrangères, José Ramos Horta a accepté une invitation du régime birman de visiter le pays en février prochain. Connu pour son soutien au combat des démocrates birmans, Mr Ramos Horta a dit son souhait de rencontrer Aung San Suu Kyi, ainsi que, bien sur, les généraux au pouvoir. Il a rappelé que des signes positifs parviennent de ce pays, et qu’ils doivent être soutenus. On se souvient également que les généraux sont considérés comme un frein à l’entrée du Timor Oriental au sein de l’ASEAN, justement du fait des déclarations de ses dirigeants en faveur du combat d’Aung San Suu Kyi.



La conscription forcée stoppée par la junte ?
Source : Narinjara news, 5 novembre 2002

La junte a donné des ordres pour mettre fin à la pratique de conscription forcée, notamment celle des enfants. Un ordre officiel avait déjà paru il y a quelques mois, mais il avait été sans effet sur la réalité de l’enrôlement de force d’enfants de 13 ou 14 ans. Il semblerait que la junte veuille faire bonne figure face à une communauté internationale que cette question révolte particulièrement.


Net Hebdo est une newsletter gratuite éditée tous les mercredis par l'association Info Birmanie.
Pour vous abonner, il vous suffit d'écrire à l'association: info-birmanie@globenet.org
Une version papier mensuelle est disponible contre 20 EUR par an.

Info Birmanie - 9 passage Dagorno - 75020 Paris - 01 44 93 93 57 - info-birmanie@globenet.org - www.birmanie.org