Birmanie>Net Hebdo n° 34
La lettre d'information hebdomadaire d'Info Birmanie


Sommaire

  • Khin Nyunt nommé Premier Ministre
  • La junte birmane joue les apprenties démocrates
  • Le plan de réforme émis par la junte ne prévoit pas la libération de ASSK.
  • Inquiétudes autour de l'état de santé d'Aung San Suu Kyi
  • Les réformes annoncées ne trompent personne


Khin Nyunt nommé Premier Ministre
Source: Reuters, 25 août 2003

Le général Than Shwe a renoncé à son poste de Premier ministre du Myanmar et sera remplacé par le général Khin Nyunt, actuellement "numéro trois" de la junte militaire au pouvoir, rapportent lundi les médias officiels. "Afin de répondre plus efficacement aux intérêts de l'Etat et de l'ensemble du peuple, (la junte) a nommé Premier ministre d'Etat le général Khin Nyunt à compter d'aujourd'hui", a annoncé la junte dans un communiqué diffusé à la radio et à la télévision.Than Shwe conservera néanmoins ses fonctions de président du Conseil de la junte et de commandant en chef des forces armées, précise la radio. Selon des diplomates en poste à Yangon, le nouveau Premier ministre est considéré comme un réformiste mais on ne sait pas encore quelles seront les conséquences de sa nomination sur le sort de l'opposante Aung San Suu Kyi, dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) qui est actuellement détenue. "C'est un bon signe pour la transition politique et la réforme économique. D'après ce que nous savons de lui, Khin Nyunt a un entourage beaucoup plus éduqué", a déclaré à Reuters un diplomate asiatique. "Cela pourrait avoir un certain impact sur les relations entre le SPDC et
la LND", a-t-il ajouté. Yangon a jusqu'à présent ignoré les pressions internationales croissantes en faveur de la libération de Kyi, arrêtée il y a trois mois lors d'un accrochage entre des membres de son parti et de jeunes partisans du gouvernement. Pour protester contre l'emprisonnement de la récipiendaire du Prix Nobel de la Paix, les Etats-Unis et l'Union européenne ont imposé des sanctions sévères au Myanmar et le Japon a interrompu le versement d'aides financières.

La junte birmane joue les apprenties démocrates
Source: Libération, 1er septembre 2003

Après 40 ans de dictature, les opposants sont sceptiques.
Par Arnaud DUBUS

Nouvelle Constitution, élections "justes et libres"... C'est le même programme que celui annoncé par la junte en 1988 et "renié" en 1990.     

Le plan de "restauration de la démocratie", annoncé samedi par la junte de Rangoon, se heurte à un mur de scepticisme du côté de l'opposition. Dans son premier discours en tant que chef du gouvernement, le général Khin Nyunt a déclaré la mise en place "dès que possible" d'une "feuille de route" en sept points visant à transformer la Birmanie, sous la coupe des militaires depuis
plus de quarante ans, en un pays "moderne, démocratique et développé". Selon ce général, un pragmatique âgé de 63 ans, le plan consiste d'abord à reconvoquer la Convention nationale, une assemblée déjà réunie il y a dix ans pour élaborer une nouvelle Constitution. Doivent suivre un référendum sur la Constitution, des élections "justes et libres" et la formation d'un gouvernement composé de parlementaires élus. C'est exactement le même programme que celui annoncé par la junte en septem bre 1988 après avoir réaffirmé son emprise sur le pays en écrasant dans le sang des manifestations prodémocratiques. Mais, en mai 1990, les généraux avaient refusé d'accepter les résultats des élections largement remportées par la Ligue nationale pour la démocratie, dirigée par l'opposante Aung San Suu Kyi. Echaudés par cette expérience, les opposants n'accordent aucun crédit à l'annonce faite par Khin Nyunt. "Ils disent la même chose depuis dix ans. Il n'y a rien de nouveau", estime Aung Zaw, rédacteur en chef d'Irrawaddy, un magazine birman publié en Thaïlande. La Con vention nationale réunie en 1993 était composée en majorité de membres nommés par le pouvoir militaire avec une minorité de politiciens élus en 1990. La Constitution ébauchée par l'assemblée avait adopté des principes directeurs garantissant le futur rôle de l'armée en politique et écartant Aung San Suu Kyi du pouvoir. Incapable d'influencer le processus, la Ligue s'était retirée des débats en 1995 et la Con vention avait été suspendue. Dans son discours inaugural, Khin Nyunt, n'a pas mentionné la participation de l'opposante birmane, détenue au secret depuis trois mois, dans cette "feuille de route", ni même sa prochaine libération. C'est inacceptable pour les opposants. "S'ils veulent élaborer une Constitution, ils doivent d'abord relâcher Aung San Suu Kyi et immédiatement entamer un dialogue avec elle", assène Aung Moe Zaw, secrétaire général du gouvernement birman en exil.


Le plan de réforme émis par la junte ne prévoit pas la libération de ASSK.
Sydney Morning Herald August 31, 2003

Le gouvernement militaire birman a publié une feuille de route allant vers une transition démocratique mais refuse d’en donner le calendrier. De plus, il reste muet sur la date de libération d’ Aung San Suu Kyi, leader du principal mouvement d’opposition. Le Général Khin Nyunt, le Chef des services de renseignements récemment nommé Premier Ministre, a déclaré que les pourparlers autour du projet d’une nouvelle constitution pourraient reprendre, menant à un referendum national pour une réforme politique et à de possibles élections. Mais, lors d’une réunion avec les Officiers généraux ce week-end, le Général Khin Nyunt n’a donné aucune assurance quant à la libération de ASSK, qui est retenue dans un endroit secret de Rangoun depuis un heurt sanglant avec son parti le LND en Mai. Les groupes birmans exilés et les experts sur la question rejettent cette réforme en sept points, y voyant un subterfuge pour faire baisser la forte pression internationale – désormais suivie par les voisins Sud asiatiques de la Birmanie-  en faveur de la libération de Suu Kyi et d’un retour à un gouvernement civil. La semaine dernière, la nomination du général Khin Nyunt comme premier ministre à la suite du chef de la junte, le général Than Shwe, a nourri les spéculations sur un retournement politique imminent. Le premier ministre Thaïlandais, Chavalit Yongchaiyudh, qui est proche des généraux birmans, a annoncé que Suu Kyi serait libérée d’ici quatre ou cinq mois et qu’elle jouerait un rôle important dans le nouveau gouvernement. Cependant, le Général Khin Nyunt n’a fait qu’une seule référence au Prix Nobel de la Paix dans son discours pour l’accuser, elle et le LND, de l’échec des discussions sur le projet d’une nouvelle constitution en 1996. " Les tentatives de coopération ultérieures du gouvernement pour résoudre les problèmes par le dialogue avec les leaders du gouvernement ont aussi échouées, principalement à cause des interferences colonialistes. " a t-il déclaré. Le plan pour une réforme démocratique devrait commencer avec le rappel de l’ancienne convention constitutionnelle composée des mêmes membres, a t-il dit. Aucune date n’a été précisée, mais un ancien militaire officiel a déclaré à Reuters, une agence d’information, qu’on espérait commencer les discussions le plus tôt possible. Le Général Khin Nyunt a déclaré qu’une constitution avait déjà été approuvée, et qu’elle serait soumise à un referendum national. Si elle est votée, elle devrait mener à l’organisation d’élections libres et justes conformément à la Constitution. La LND qui avait remporté une victoire écrasante aux dernières élections nationales en 1990, n’avait pu prendre le pouvoir du fait de la junte qui dirige le pays depuis le coup d’état de 1962, et qui a conduit son économie au bord de la banqueroute. Les exilés birmans importants ont rejeté les propositions de réforme. Ils les considèrent comme une tentative superficielle pour faire se relâcher la pression étouffante des sanctions économiques internationales, qui ont été renforcées à la suite de la dernière arrestation de Suu Kyi, et des exigences croissantes de monnaie de la part des membres associés de l’Association des Nations de l’Asie du Sud Est. Aung Zaw, l’éditeur du magazine Irrawaddy, publié en Thaïlande, a déclaré : "  Il n’y a pas de quoi se réjouir. Il s’agit exactement de la même chose que ce que le régime avait publié il y a 10 ans. Rien n’a changé. " Les Etats-Unis, qui se sont rangés aux côtés de l’Union Européenne et du Japon pour durcir les sanctions contre la Birmanie, ont répondu vendredi à la nomination du général Khin Nyunt comme premier ministre, en renouvelant leur demande de libération de Suu Kyi et d’autres officiels de la LND emprisonnés. " L’attente pour relâcher Aung San Suu Kyi et les autres qui ont été emprisonnés pour avoir exprimé pacifiquement leur point de vue politique est intolérable. " a déclaré le porte parole du département d'Etat Philip Reeker. " Il est évident qu’aucun progrès ne sera possible sans la libération inconditionnelle de Aung San Suu Kyi et la reprise de sa capacité à voyager librement en Birmanie. "

Inquiétudes autour de l'état de santé d'Aung San Suu Kyi
Source: Le Monde, 2 septembre 2003


Le département d'Etat américain a affirmé mardi, pour la deuxième fois en
deux jours, que l'opposante a commencé une grève de la faim pour protester contre sa détention. Le gouvernement militaire birman a de nouveau démenti mercredi cette allégation.  Le gouvernement militaire birman a de nouveau démenti, mercredi 3 septembre, que l'opposante Aung San Suu Kyi soit en grève de la faim, accusant Washington de lancer des "affirmations irresponsables" pour servir ses intérêts. Le département d'Etat américain avait affirmé la veille, pour la deuxième fois en deux jours, que l'opposante avait engagé une grève de la faim pour protester contre sa détention depuis le 30 mai. Il a assuré avoir "des informations crédibles" en provenance de son ambassade à Rangoun mais refusé d'en préciser la source. La mission américaine à Rangoun a elle aussi refusé de fournir la moindre précision, notamment sur la date du début d'une éventuelle grève de la faim, s'en tenant aux termes du communiqué du département d'Etat. "Nous avons déjà réfuté lundi dernier les allégations douteuses du département d'Etat sur une supposée grève de la faim d'Aung San Suu Kyi", a rappelé mercredi un porte-parole de la junte birmane dans un communiqué. Le porte-parole ajoute qu'"au vu de notre expérience, le département d'Etat va continuer de lancer plus d'allégations sans fondement (à l'approche) de l'Assemblée générale
de l'ONU".  Mardi, le rapporteur spécial de la commission des droits de l'homme de l'ONU sur la Birmanie, Paulo Sergio Pinheiro, s'était dit "très préoccupé" par la santé de l'opposante, sans toutefois pouvoir confirmer qu'elle avait commencé une grève de la faim, selon un communiqué de l'ONU. "Bien que les restrictions à l'information rendent impossible de confirmer cette nouvelle [d'une grève de la faim], le rapporteur spécial demeure très préoccupé de l'emprisonnement d'Aung San Suu Kyi dans un lieu tenu secret et de l'effet de cette détention sur sa sécurité et sa santé", soulignait le communiqué. Dans ce texte, M. Pinheiro réitérait également son appel au gouvernement de Rangoun à "libérer Aung San Suu Kyi immédiatement et sans condition", et soulignait qu'il était de la responsabilité de la junte au pouvoir en Birmanie d'assurer sa sécurité. Le département d'Etat américain avait affirmé auparavant, sans révéler ses
sources, avoir appris qu'Aung San Suu Kyi avait débuté une grève de la faim pour protester contre sa détention dans une prison depuis fin mai. Mme Suu Kyi, Prix Nobel de la paix, a été écrouée après de violents incidents entre ses partisans et des éléments pro-gouvernementaux qui ont apparemment tendu une embuscade à son convoi.

DÉCLARATION AMÉRICAINE "SANS FONDEMENT"

La junte au pouvoir en Birmanie avait déjà démenti lundi cette déclaration du département d'Etat américain. "Cette déclaration est sans fondement", avait annoncé un communiqué du ministère des affaires étrangères birman, qui avait qualifié l'affirmation de Washington de "moyen de jeter une ombre sur les évolutions politiques en Birmanie, en particulier [l'annonce d']une feuille de route vers la démocratie par le premier ministre [le général Khin Nyunt] le 30 août". Peu avant cette déclaration, la junte s'était dit "déconcertée" par l'affirmation américaine et avait estimé qu'il était "plutôt bizarre d'avancer une telle allégation sans citer de source qui permettrait de la vérifier". "Le
gouvernement birman partage le point de vue des Etats-Unis selon lequel les gouvernements sont pleinement responsables du bien-être de tous leurs prisonniers politiques", avait commenté la junte, poursuivant : "Nous croyons également que les gouvernements sont pleinement responsables de la sécurité, du bien-être et de l'intérêt de tous les autres citoyens." Le nouveau premier ministre birman, Khin Nyunt, avait annoncé samedi un plan en sept points, officiellement destiné à restaurer la démocratie. Ce programme inclut des élections "justes et libres" et une nouvelle Constitution, mais sans fixer de calendrier. Plusieurs analystes voient plutôt dans cette annonce la répétition d'anciens vœux pieux et doutent qu'elle préfigure une réelle libéralisation du pays et encore moins la prochaine libération de Mme Suu Kyi. La Birmanie est gouvernée depuis 1962 par une junte militaire qui a refusé de reconnaître les résultats des élections de 1990. Celles-ci s'étaient traduites par la victoire sans appel du parti d'Aung San Suu Kyi.


Les réformes annoncées ne trompent personne
Communiqué de presse

FIDH, Forum Asie Démocratie, France Libertés, Info Birmanie, Khiasma, Survie

Arrêtée lors de l’attaque meurtrière de son convoi et détenue dans un lieu secret depuis le 30 mai 2003 par la junte birmane, Madame Aung San suu Kyi, leader des démocrates birmans, aurait entamé une grève de la faim selon le secrétariat d’Etat Américain.

Le Prix Nobel de la Paix proteste ainsi contre sa détention et révèle sa détermination à mettre en difficulté un régime dictatorial qui, pour la énième fois, vient d’annoncer un plan de démocratisation de la Birmanie.

Le SPDC, par la voix de Khin Nyunt récemment nommé Premier Ministre,  a annoncé ce 30 août un plan gouvernemental soi-disant destiné à conduire le pays vers la démocratie. Cette feuille de route prévoit l’adoption d’une nouvelle Constitution et l’organisation d’élections, mesures déjà promises par la junte lors de son coup d’Etat du 18 septembre 1988 et suivies dans les faits par le durcissement de la répression. De plus ces mesures seraient prises par la Convention Nationale, déjà rejetée par l'opposition pro-démocratique (après avoir refusé au Parlement élu de se réunir, les militaires birmans avaient monté de toutes pièces une Convention toute à leur avantage, à laquelle les démocrates s'étaient joints dans un premier temps avant de la dénoncer).

Daniel Aung, ancien membre de cette Convention et membre influent de l'opposition en exil, le précise:  " Le fait de convoquer à nouveau la Convention Nationale illégitime, démontre clairement que la junte n’a aucune volonté politique de mener à bien une vraie réforme politique ainsi qu’une réconciliation nationale par le dialogue. C’est pourquoi, nous invitons le mouvement démocrate birman et la communauté internationale à intensifier leurs actions concertées et coordonnées pour la libération de Aung San Suu Kyi et de tous les prisonniers politiques ; mais aussi à encourager un plan de démocratisation de la Birmanie immédiat élaboré à l’aide des Nations-Unies et soutenu internationalement. "

 Il est en effet à noter que le sort d’Aung San Suu Kyi n'est pas évoqué dans la déclaration du nouveau Premier Ministre, alors que sa libération est la première exigence de la communauté internationale.

Les centaines de militants de son parti, la Ligue Nationale pour la Démocratie (LND),  arrêtés le 30 mai dernier sont toujours détenus et les bureaux de la LND ne sont pas autorisés à rouvrir. Dans ces conditions, les mesures annoncées ne trompent personne. Elles visent uniquement à obtenir un relâchement de la pression internationale.

Au regard de cette situation, nos organisations réitèrent leur appel aux autorités birmanes à libérer immédiatement et sans conditions Aung San Suu Kyi et les membres de son parti. A l’instar des démocrates birmans, elles demandent au Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, de mettre la Birmanie à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.

Elles appellent la communauté internationale à maintenir et renforcer la pression, y compris économique, sur la junte birmane en vue de l’instauration d’un Etat de droit.
D’ores et déjà, le Japon a gelé son aide financière et les Etats-Unis ont rendu effectives les sanctions économiques approuvées par G.W Bush il y a un mois.

Nos organisations réitèrent leur appel au retrait de tous les investissements français en Birmanie et au boycott du tourisme en Birmanie demandé expressément par les démocrates birmans et demande à la compagnie pétrolière Total, qualifiée de " premier soutien de la junte " par Aung San Suu Kyi, de se retirer de Birmanie.

Nous invitons l’Union européenne à continuer d’exiger avec la plus grande fermeté la libération d’Aung San Suu Kyi, et le gouvernement français à se désolidariser de la compagnie TOTAL et à mettre en garde les touristes français se rendant en Birmanie du soutien implicite à la junte que représentent leurs devises.

















Net Hebdo est une newsletter gratuite éditée tous les mercredis par l'association Info Birmanie.
Pour vous abonner, il vous suffit d'écrire à l'association: info-birmanie@globenet.org
Une version papier mensuelle est disponible contre 20 EUR par an.

Info Birmanie - 9 passage Dagorno - 75020 Paris - 01 44 93 93 57 - info-birmanie@globenet.org - www.birmanie.org