Khin Nyunt nommé Premier
Ministre
Source: Reuters, 25 août 2003
Le général Than Shwe a renoncé à son poste de Premier ministre du Myanmar
et sera remplacé par le général Khin Nyunt, actuellement "numéro trois" de
la junte militaire au pouvoir, rapportent lundi les médias officiels. "Afin
de répondre plus efficacement aux intérêts de l'Etat et de l'ensemble du
peuple, (la junte) a nommé Premier ministre d'Etat le général Khin Nyunt à
compter d'aujourd'hui", a annoncé la junte dans un communiqué diffusé à la
radio et à la télévision.Than Shwe conservera néanmoins ses fonctions de
président du Conseil de la junte et de commandant en chef des forces armées,
précise la radio. Selon des diplomates en poste à Yangon, le nouveau Premier
ministre est considéré comme un réformiste mais on ne sait pas encore quelles
seront les conséquences de sa nomination sur le sort de l'opposante Aung San
Suu Kyi, dirigeante de la Ligue nationale pour la démocratie (LND) qui est
actuellement détenue. "C'est un bon signe pour la transition politique et
la réforme économique. D'après ce que nous savons de lui, Khin Nyunt a un
entourage beaucoup plus éduqué", a déclaré à Reuters un diplomate asiatique.
"Cela pourrait avoir un certain impact sur les relations entre le SPDC et
la LND", a-t-il ajouté. Yangon a jusqu'à présent ignoré les pressions
internationales croissantes en faveur de la libération de Kyi, arrêtée il
y a trois mois lors d'un accrochage entre des membres de son parti et de
jeunes partisans du gouvernement. Pour protester contre l'emprisonnement
de la récipiendaire du Prix Nobel de la Paix, les Etats-Unis et l'Union européenne
ont imposé des sanctions sévères au Myanmar et le Japon a interrompu le versement
d'aides financières.
La junte birmane joue les
apprenties démocrates
Source: Libération, 1er septembre 2003
Après 40 ans de dictature, les opposants sont sceptiques.
Par Arnaud DUBUS
Nouvelle Constitution, élections "justes et libres"... C'est le même programme
que celui annoncé par la junte en 1988 et "renié" en 1990.
Le plan de "restauration de la démocratie", annoncé samedi par la junte
de Rangoon, se heurte à un mur de scepticisme du côté de l'opposition. Dans
son premier discours en tant que chef du gouvernement, le général Khin Nyunt
a déclaré la mise en place "dès que possible" d'une "feuille de route" en
sept points visant à transformer la Birmanie, sous la coupe des militaires
depuis
plus de quarante ans, en un pays "moderne, démocratique et développé".
Selon ce général, un pragmatique âgé de 63 ans, le plan consiste d'abord à
reconvoquer la Convention nationale, une assemblée déjà réunie il y a dix
ans pour élaborer une nouvelle Constitution. Doivent suivre un référendum
sur la Constitution, des élections "justes et libres" et la formation d'un
gouvernement composé de parlementaires élus. C'est exactement le même programme
que celui annoncé par la junte en septem bre 1988 après avoir réaffirmé son
emprise sur le pays en écrasant dans le sang des manifestations prodémocratiques.
Mais, en mai 1990, les généraux avaient refusé d'accepter les résultats des
élections largement remportées par la Ligue nationale pour la démocratie,
dirigée par l'opposante Aung San Suu Kyi. Echaudés par cette expérience, les
opposants n'accordent aucun crédit à l'annonce faite par Khin Nyunt. "Ils
disent la même chose depuis dix ans. Il n'y a rien de nouveau", estime Aung
Zaw, rédacteur en chef d'Irrawaddy, un magazine birman publié en Thaïlande.
La Con vention nationale réunie en 1993 était composée en majorité de membres
nommés par le pouvoir militaire avec une minorité de politiciens élus en 1990.
La Constitution ébauchée par l'assemblée avait adopté des principes directeurs
garantissant le futur rôle de l'armée en politique et écartant Aung San Suu
Kyi du pouvoir. Incapable d'influencer le processus, la Ligue s'était retirée
des débats en 1995 et la Con vention avait été suspendue. Dans son discours
inaugural, Khin Nyunt, n'a pas mentionné la participation de l'opposante
birmane, détenue au secret depuis trois mois, dans cette "feuille de route",
ni même sa prochaine libération. C'est inacceptable pour les opposants. "S'ils
veulent élaborer une Constitution, ils doivent d'abord relâcher Aung San
Suu Kyi et immédiatement entamer un dialogue avec elle", assène Aung Moe
Zaw, secrétaire général du gouvernement birman en exil.
Le plan de réforme émis
par la junte ne prévoit pas la libération de ASSK.
Sydney Morning Herald August 31, 2003
Le gouvernement militaire birman a publié une feuille de route allant
vers une transition démocratique mais refuse d’en donner le calendrier.
De plus, il reste muet sur la date de libération d’ Aung San Suu Kyi, leader
du principal mouvement d’opposition. Le Général Khin Nyunt, le Chef des
services de renseignements récemment nommé Premier Ministre, a déclaré que
les pourparlers autour du projet d’une nouvelle constitution pourraient
reprendre, menant à un referendum national pour une réforme politique et
à de possibles élections. Mais, lors d’une réunion avec les Officiers généraux
ce week-end, le Général Khin Nyunt n’a donné aucune assurance quant à la
libération de ASSK, qui est retenue dans un endroit secret de Rangoun depuis
un heurt sanglant avec son parti le LND en Mai. Les groupes birmans exilés
et les experts sur la question rejettent cette réforme en sept points, y
voyant un subterfuge pour faire baisser la forte pression internationale
– désormais suivie par les voisins Sud asiatiques de la Birmanie- en faveur
de la libération de Suu Kyi et d’un retour à un gouvernement civil. La semaine
dernière, la nomination du général Khin Nyunt comme premier ministre à la
suite du chef de la junte, le général Than Shwe, a nourri les spéculations
sur un retournement politique imminent. Le premier ministre Thaïlandais,
Chavalit Yongchaiyudh, qui est proche des généraux birmans, a annoncé que
Suu Kyi serait libérée d’ici quatre ou cinq mois et qu’elle jouerait un rôle
important dans le nouveau gouvernement. Cependant, le Général Khin Nyunt
n’a fait qu’une seule référence au Prix Nobel de la Paix dans son discours
pour l’accuser, elle et le LND, de l’échec des discussions sur le projet
d’une nouvelle constitution en 1996. " Les tentatives de coopération ultérieures
du gouvernement pour résoudre les problèmes par le dialogue avec les leaders
du gouvernement ont aussi échouées, principalement à cause des interferences
colonialistes. " a t-il déclaré. Le plan pour une réforme démocratique devrait
commencer avec le rappel de l’ancienne convention constitutionnelle composée
des mêmes membres, a t-il dit. Aucune date n’a été précisée, mais un ancien
militaire officiel a déclaré à Reuters, une agence d’information, qu’on espérait
commencer les discussions le plus tôt possible. Le Général Khin Nyunt a déclaré
qu’une constitution avait déjà été approuvée, et qu’elle serait soumise à
un referendum national. Si elle est votée, elle devrait mener à l’organisation
d’élections libres et justes conformément à la Constitution. La LND qui avait
remporté une victoire écrasante aux dernières élections nationales en 1990,
n’avait pu prendre le pouvoir du fait de la junte qui dirige le pays depuis
le coup d’état de 1962, et qui a conduit son économie au bord de la banqueroute.
Les exilés birmans importants ont rejeté les propositions de réforme. Ils
les considèrent comme une tentative superficielle pour faire se relâcher
la pression étouffante des sanctions économiques internationales, qui ont
été renforcées à la suite de la dernière arrestation de Suu Kyi, et des exigences
croissantes de monnaie de la part des membres associés de l’Association des
Nations de l’Asie du Sud Est. Aung Zaw, l’éditeur du magazine Irrawaddy,
publié en Thaïlande, a déclaré : " Il n’y a pas de quoi se réjouir. Il s’agit
exactement de la même chose que ce que le régime avait publié il y a 10 ans.
Rien n’a changé. " Les Etats-Unis, qui se sont rangés aux côtés de l’Union
Européenne et du Japon pour durcir les sanctions contre la Birmanie, ont
répondu vendredi à la nomination du général Khin Nyunt comme premier ministre,
en renouvelant leur demande de libération de Suu Kyi et d’autres officiels
de la LND emprisonnés. " L’attente pour relâcher Aung San Suu Kyi et les
autres qui ont été emprisonnés pour avoir exprimé pacifiquement leur point
de vue politique est intolérable. " a déclaré le porte parole du département
d'Etat Philip Reeker. " Il est évident qu’aucun progrès ne sera possible
sans la libération inconditionnelle de Aung San Suu Kyi et la reprise de
sa capacité à voyager librement en Birmanie. "
Inquiétudes autour
de l'état de santé d'Aung San Suu Kyi
Source: Le Monde, 2 septembre 2003
Le département d'Etat américain a affirmé mardi, pour la deuxième fois
en
deux jours, que l'opposante a commencé une grève de la faim pour protester
contre sa détention. Le gouvernement militaire birman a de nouveau démenti
mercredi cette allégation. Le gouvernement militaire birman a de nouveau
démenti, mercredi 3 septembre, que l'opposante Aung San Suu Kyi soit en grève
de la faim, accusant Washington de lancer des "affirmations irresponsables"
pour servir ses intérêts. Le département d'Etat américain avait affirmé la
veille, pour la deuxième fois en deux jours, que l'opposante avait engagé
une grève de la faim pour protester contre sa détention depuis le 30 mai.
Il a assuré avoir "des informations crédibles" en provenance de son ambassade
à Rangoun mais refusé d'en préciser la source. La mission américaine à Rangoun
a elle aussi refusé de fournir la moindre précision, notamment sur la date
du début d'une éventuelle grève de la faim, s'en tenant aux termes du communiqué
du département d'Etat. "Nous avons déjà réfuté lundi dernier les allégations
douteuses du département d'Etat sur une supposée grève de la faim d'Aung
San Suu Kyi", a rappelé mercredi un porte-parole de la junte birmane dans
un communiqué. Le porte-parole ajoute qu'"au vu de notre expérience, le département
d'Etat va continuer de lancer plus d'allégations sans fondement (à l'approche)
de l'Assemblée générale
de l'ONU". Mardi, le rapporteur spécial de la commission des droits de
l'homme de l'ONU sur la Birmanie, Paulo Sergio Pinheiro, s'était dit "très
préoccupé" par la santé de l'opposante, sans toutefois pouvoir confirmer
qu'elle avait commencé une grève de la faim, selon un communiqué de l'ONU.
"Bien que les restrictions à l'information rendent impossible de confirmer
cette nouvelle [d'une grève de la faim], le rapporteur spécial demeure très
préoccupé de l'emprisonnement d'Aung San Suu Kyi dans un lieu
tenu secret et de l'effet de cette détention sur sa sécurité et sa santé",
soulignait le communiqué. Dans ce texte, M. Pinheiro réitérait également
son appel au gouvernement de Rangoun à "libérer Aung San Suu Kyi immédiatement
et sans condition", et soulignait qu'il était de la responsabilité de la
junte au pouvoir en Birmanie d'assurer sa sécurité. Le département d'Etat
américain avait affirmé auparavant, sans révéler ses
sources, avoir appris qu'Aung San Suu Kyi avait débuté une grève de la
faim pour protester contre sa détention dans une prison depuis fin mai. Mme
Suu Kyi, Prix Nobel de la paix, a été écrouée après de violents incidents
entre ses partisans et des éléments pro-gouvernementaux qui ont
apparemment tendu une embuscade à son convoi.
DÉCLARATION AMÉRICAINE "SANS FONDEMENT"
La junte au pouvoir en Birmanie avait déjà démenti lundi cette déclaration
du département d'Etat américain. "Cette déclaration est sans fondement",
avait annoncé un communiqué du ministère des affaires étrangères
birman, qui avait qualifié l'affirmation de Washington de "moyen
de jeter une ombre sur les évolutions politiques en Birmanie,
en particulier [l'annonce d']une feuille de route vers la démocratie par
le premier ministre [le général Khin Nyunt] le 30 août". Peu
avant cette déclaration, la junte s'était dit "déconcertée" par
l'affirmation américaine et avait estimé qu'il était "plutôt bizarre d'avancer
une telle allégation sans citer de source qui permettrait de la vérifier".
"Le
gouvernement birman partage le point de vue des Etats-Unis selon lequel
les gouvernements sont pleinement responsables du bien-être
de tous leurs prisonniers politiques", avait commenté la junte, poursuivant
: "Nous croyons également que les gouvernements sont pleinement responsables
de la sécurité, du bien-être et de l'intérêt de tous les autres citoyens."
Le nouveau premier ministre birman, Khin Nyunt, avait annoncé samedi un
plan en sept points, officiellement destiné à restaurer la démocratie. Ce
programme inclut des élections "justes et libres" et une nouvelle Constitution,
mais sans fixer de calendrier. Plusieurs analystes voient plutôt dans cette
annonce la répétition d'anciens vœux pieux et doutent qu'elle préfigure
une réelle libéralisation du pays et encore moins la prochaine libération
de Mme Suu Kyi. La Birmanie est gouvernée depuis 1962 par une junte militaire
qui a refusé de reconnaître les résultats des élections de 1990. Celles-ci
s'étaient traduites par la victoire sans appel du parti d'Aung San Suu Kyi.
Les réformes annoncées ne
trompent personne
Communiqué de presse
FIDH, Forum Asie Démocratie, France Libertés, Info Birmanie, Khiasma,
Survie
Arrêtée lors de l’attaque meurtrière de son convoi et détenue dans un
lieu secret depuis le 30 mai 2003 par la junte birmane, Madame Aung San
suu Kyi, leader des démocrates birmans, aurait entamé une grève de la faim
selon le secrétariat d’Etat Américain.
Le Prix Nobel de la Paix proteste ainsi contre sa détention et révèle
sa détermination à mettre en difficulté un régime dictatorial qui, pour
la énième fois, vient d’annoncer un plan de démocratisation de la Birmanie.
Le SPDC, par la voix de Khin Nyunt récemment nommé Premier Ministre,
a annoncé ce 30 août un plan gouvernemental soi-disant destiné à conduire
le pays vers la démocratie. Cette feuille de route prévoit l’adoption d’une
nouvelle Constitution et l’organisation d’élections, mesures déjà promises
par la junte lors de son coup d’Etat du 18 septembre 1988 et suivies dans
les faits par le durcissement de la répression. De plus ces mesures seraient
prises par la Convention Nationale, déjà rejetée par l'opposition pro-démocratique
(après avoir refusé au Parlement élu de se réunir, les militaires birmans
avaient monté de toutes pièces une Convention toute à leur avantage, à laquelle
les démocrates s'étaient joints dans un premier temps avant de la dénoncer).
Daniel Aung, ancien membre de cette Convention et membre influent de l'opposition
en exil, le précise: " Le fait de convoquer à nouveau la Convention Nationale
illégitime, démontre clairement que la junte n’a aucune volonté politique
de mener à bien une vraie réforme politique ainsi qu’une réconciliation nationale
par le dialogue. C’est pourquoi, nous invitons le mouvement démocrate birman
et la communauté internationale à intensifier leurs actions concertées et
coordonnées pour la libération de Aung San Suu Kyi et de tous les prisonniers
politiques ; mais aussi à encourager un plan de démocratisation de la Birmanie
immédiat élaboré à l’aide des Nations-Unies et soutenu internationalement.
"
Il est en effet à noter que le sort d’Aung San Suu Kyi n'est pas évoqué
dans la déclaration du nouveau Premier Ministre, alors que sa libération
est la première exigence de la communauté internationale.
Les centaines de militants de son parti, la Ligue Nationale pour la Démocratie
(LND), arrêtés le 30 mai dernier sont toujours détenus et les bureaux de
la LND ne sont pas autorisés à rouvrir. Dans ces conditions, les mesures
annoncées ne trompent personne. Elles visent uniquement à obtenir un relâchement
de la pression internationale.
Au regard de cette situation, nos organisations réitèrent leur appel aux
autorités birmanes à libérer immédiatement et sans conditions Aung San Suu
Kyi et les membres de son parti. A l’instar des démocrates birmans, elles
demandent au Secrétaire général des Nations unies, Kofi Annan, de mettre
la Birmanie à l’ordre du jour du Conseil de sécurité.
Elles appellent la communauté internationale à maintenir et renforcer
la pression, y compris économique, sur la junte birmane en vue de l’instauration
d’un Etat de droit.
D’ores et déjà, le Japon a gelé son aide financière et les Etats-Unis
ont rendu effectives les sanctions économiques approuvées par G.W Bush il
y a un mois.
Nos organisations réitèrent leur appel au retrait de tous les investissements
français en Birmanie et au boycott du tourisme en Birmanie demandé expressément
par les démocrates birmans et demande à la compagnie pétrolière Total, qualifiée
de " premier soutien de la junte " par Aung San Suu Kyi, de se retirer de
Birmanie.
Nous invitons l’Union européenne à continuer d’exiger avec la plus grande
fermeté la libération d’Aung San Suu Kyi, et le gouvernement français à se
désolidariser de la compagnie TOTAL et à mettre en garde les touristes français
se rendant en Birmanie du soutien implicite à la junte que représentent leurs
devises.