Réouverture de la Convention Nationale
Communiqué de Presse d'Info Birmanie
19 mai 2004
La Convention Nationale birmane, en sommeil depuis 1996 suite au retrait en 1995 de la Ligue Nationale pour la Démocratie (NLD), vient de reprendre ses travaux lundi 17 mai, malgré l'absence du parti d'Aung San Suu Kyi.
La pression internationale qui a suivi l'arrestation du Prix Nobel de la Paix le 30 mai 2003 lors d'une attaque d'une rare violence orchestrée par la junte militaire avait obligé les autorités de Rangoun a faire montre de bonne volonté en lançant l'idée d'une feuille de route dont l'un des point principaux etaient le lancement d'une Convention Nationale.
La communauté internationale avait accueilli favorablement cette initiative, tout en posant très clairement la question de sa forme. Concrètement, l'inquiétude etait grande de voir le scénario de 1993 se répéter.
Ce double constat devait amener la Thaïlande a organiser, le 15 décembre 2003, une réunion interministérielle sur le thème de la démocratisation de la Birmanie en présence des principaux voisins de celle-ci, auxquels se joignaient la Chine, l'Inde, l'Australie, le Japon, et quatre pays européens dont la France.
Cette réunion, dite "Processus de Bangkok", n'a pas amenée de vraies avancées, mais au moins la junte militaire birmane semblait accepter de discuter de son propre avenir avec un certain nombre d'autres pays.
Au cours des premiers mois de 2004, des libérations de prisonniers politiques ou de journalistes sont intervenues, et de nombreux groupes d'opposition négociaient avec les militaires leur participation à la Convention Nationale.
La libération d'Aung San Suu Kyi etait très souvent évoquée, ainsi que celle de son bras droit Tin OO. Des nouvelles contradictoires parvenaient de Rangoun, mais le contexte paraissait plus positif qu'il ne l'avait été depuis bien longtemps dans ce pays.
La seconde réunion du Bangkok Process, prévue le 29 avril, aurait pu se tenir dans des conditions assez favorables à toutes parties, si la junte avait effectivement libéré Suu Kyi, avait permis la réouverture des bureaux de son parti, et que le climat général avait amené l'opposition à participer à la Convention Nationale.
Au lieu de cela, force est de constater que les militaires ont souhaité rompre brutalement avec cette logique en ne libérant pas les deux principaux dirigeants de la NLD, et en ne faisant pas le minimum de compromis qui auraient amenés l'opposition à participer à la Convention Nationale.
De fait, et de l'avis même de l'ensemble des observateurs, ONU comprise, et de la plupart des pays dont la Thaïlande, les Etats-Unis, l'UE, etc, cette Convention n'a plus le moindre crédibilité, voire le moindre intérêt.
De ce point de vue, nous notons que les diplomates de très nombreux pays ont refusé de se rendre dans la zone militaire, interdite aux journalistes, et à fortiori aux ONG, où se tient ce qu'il faut bien considérer comme une mascarade.
Nous demandons donc aux autorités militaires de Birmanie:
- de libérer l'ensemble des prisonniers politiques, dont Aung San Suu Kyi
- de clore la Convention Nationale
- de lancer un véritable Processus de dialogue avec l'opposition
- de renouer les liens pris avec la communauté internationale lors de la rencontre de Bangkok le 15 décembre dernier
- de permettre la réouverture des bureaux des partis politiques
- de cesser les constantes atteintes aux droits humains dont la population est victime depuis plusieurs décennies
Nous demandons également à la communauté internationale:
- de maintenir la pression mise sur la junte depuis juin 2003
- de favoriser le retour aux discussions lancées à Bangkok
- de prendre toutes les mesures nécessaires, y compris des sanctions ciblées contre le régime birman
Kofi Annan appelle à un accord sur la participation de la NLD
AFP, 17 mai 2004
La déclaration suivante a été communiquée aujourd’hui par le porte-parole du Secrétaire général de l’ONU, M. Kofi Annan :
Le Secrétaire général est déçu d’apprendre qu’aucun accord n’a été conclu sur la participation de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) et de certains autres partis ethniques à la Convention nationale, qui doit débuter le 17 mai.
Le Secrétaire général estime que la chance qu’offre la Convention nationale ne doit pas être manquée. En conséquence, il lance un appel urgent à toutes les parties concernées, même à cette heure tardive, pour qu’elles n’épargnent aucun effort, dans les deux prochains jours, pour parvenir à un accord, en tenant compte des suggestions faites par le NLD et les autres partis politiques et ethniques, et pour qu’elles fassent avancer la démocratisation et le processus de réconciliation nationale.
Le Secrétaire général réitère son appel à l’élimination de toutes les restrictions encore imposées à Daw Aung San Suu Kyi et à son adjoint, U Tin Oo, ainsi qu’à la réouverture des bureaux du NLD afin que la Convention nationale puisse être convoquée, de nouveau, avec la participation de tous les partis politiques, y compris le NLD et les parties ethniques.
Le président Bush renouvelle pour un an les sanctions contre la Birmanie
Source: AFP, 17 mai 2004
Le président américain George W. Bush a renouvelé lundi pour un an les sanctions contre la Birmanie, estimant notamment que les autorités de Rangoun continuent de se rendre coupables d'atteintes aux droits de l'Homme, le jour de l'ouverture d'une Convention nationale sur la démocratisation boycottée par l'opposition birmane.
Les sanctions américaines contre la Birmanie datent de mai 1997 et avaient été renforcées par l'administration Bush en juillet dernier.
"La crise entre les Etats-Unis et la Birmanie, provoquée par les actions et la politique des autorités birmanes, y compris leur répression à grande échelle de l'opposition démocratique qui avait conduit à l'instauration de sanctions en mai 1997, n'a pas été résolue", a indiqué la Maison Blanche dans un communiqué.
"Ces actions et ces politiques sont hostiles aux intérêts américains et représentent une menace inhabituelle et extraordinaire pour la sécurité nationale et la politique étrangère des Etats-Unis", affirme-t-on de même source.
"Pour ces raisons, j'ai déterminé qu'il est nécessaire de maintenir les mesures d'urgence nationale à l'encontre de la Birmanie et de prolonger les
sanctions contre la Birmanie pour y répondre", indique le communiqué en précisant que cette prolongation est valable un an.
L'Union européenne et le secrétaire général de l'ONU, Kofi Annan, ont critiqué l'initiative de la junte, estimant que cette réunion perdait toute
crédibilité en l'absence de l'opposition birmane.
Les sanctions qui avaient été renforcées en juillet 2003 comprennent l'interdiction d'importer aux Etats-Unis tout produit en provenance de Birmanie, notamment pour le secteur textile, crucial pour l'économie birmane. Les Etats-Unis ont également gelé les avoirs financiers des membres de la junte birmane déposés dans les banques aux Etats-Unis et ont élargi une interdiction d'octroi de visas à des responsables du régime de Rangoun.
Déclaration d'une porte-parole adjointe du Quai d'Orsay
(Paris, le 17 mai 2004)
La France prend note qu'une Convention nationale convoquée par le Comité d'Etat pour la paix et le développement (SPDC) s'est tenu à Rangoun ce lundi et que les principaux partis du pays dont la Ligue nationale pour la démocratie ont décidé de ne pas y participer. Nous comprenons cette décision et regrettons que cette étape importante définie par la feuille de route ne remplissent pas toutes les attentes exprimées régulièrement par la communauté internationale. Une nouvelle fois, la France appelle avec insistance à la libération inconditionnelle de Mme Aung San Suu Kyi, de tous les prisonniers d'opinion retenus, la réouverture des bureaux provinciaux des partis autorisés et l'engagement rapide d'un processus de réconciliation nationale concret et sincère.
Le site de la convention: une ville miniature au milieu de bases militaires
Source: AFP, 16 mai 2004
Le gouvernement birman a créé une ville miniature dans un no man's land entouré de bases militaires à une quarantaine de km au nord de Rangoun, pour accueillir les délégués à la convention nationale qui s'ouvre lundi.
En dépit du boycottage du principal parti d'opposition, la Ligue nationale pour la démocratie (LND) d'Aung San Suu Kyi et d'autres partis, environ un milllier de délégués étaient attendus de tout le pays pour rédiger une Constitution.
La presse officielle, appelée à couvrir amplement les préparatifs de l'événement ces dernières semaines, a expliqué que les délégués pourraient, en dehors des débats, voir des films, aller dans une salle de gymnastique, un salon d'esthéticienne ou consulter un médecin.
Le complexe comprend aussi des auberges, un studio de photographie, une poste, un magasin d'alimentation générale.
La plupart des délégués étant âgés, le centre dispose d'une clinique pouvant procéder à des interventions chirurgicales d'urgence et d'un cabinet dentaire.
Mais en dépit de la propagande officielle, les visiteurs de ce complexe modernisé qui servait autrefois de centre d'activités à une organisation de masse, en ont retiré l'impression d'un endroit assez sinistre et totalement perdu.
Des journalistes locaux ayant tenté de s'approcher ont été refoulés par des gardes.
"Il faut le voir pour le croire", indique un visiteur, qui parle d'une seule route isolée conduisant au centre où les délégués risquent d'être confinés
pendant des mois.
"C'est perdu au milieu de nulle part, parmi des rizières sans aucun arbre, et personne ne pourrait s'approcher sans être vu" ajoute-t-il, "en plus c'est dans une zone militaire!"
Aucun journaliste étranger n'a reçu de visa pour l'occasion, mais les correspondants birmans des agences de presse internationales seront amenés en bus lundi de Rangoun pour couvrir la cérémonie d'ouverture et seront sans nul doute étroitement surveillés.
Ils ont reçu vendredi dernier une liste de restrictions incluant l'interdiction d'apporter du matériel d'enregistrement à la cérémonie d'ouverture.
L'organisation de défense de la liberté de la presse basée à Paris Reporters sans Frontières a indiqué que les délégués encouraient jusqu'à 20 ans de prison s'ils distribuaient à des journalistes des discours ou communiqués sans autorisation.